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 * Poèmes in
         Prisma, la jeune poésie italienne, anthologie
         dirigée par Bernard Simeone, Le temps qu'il fait,
         1995 (épuisé, en cours de
         réimpression) * Poèmes in
         La Polygraphe n°13/14, Comp'Act, 2000   * Du livre de
         l'esprit, traduction de Philippe Jaccottet,
         préface de Bernard Simeone, La Dogana (Genève)
         2001 * À prix de
         sang, traduction et préface de Bernard
         Simeone 
         
          
         
          a cura di
         Fabio Pusterla (edizioni Marcos y
         Marcos, Milano, 2000)
         
          Né en
            1932 à Milan, où il vit, Giovanni Raboni
            fut directeur d'importantes collections poétiques,
            notamment aux éditions Mondadori (" Lo Specchio
            "), Guanda (" Quaderni della Fenice") et Marsilio ("
            Poesia "). Critique littéraire et
            théâtral au Corriere della Sera, il est
            conseiller du Piccolo Teatro de Milan. Traducteur, il
            a donné une version remarquable des Fleurs
            du mal et surtout une traduction intégrale
            d'À la recherche du temps perdu
            (1983-1993). Parmi ses
            principaux recueils : Gravité du rêve
            (1982), l'authoanthologie À prix de
            sang (1988) - dont sont extraits les poèmes
            qu'on lira ici -, Poèmes guerriers et
            amoureux (1990), Chaque pensée tierce
            (1993), Quare tristis (1997)
            
                 Combien de fois
            lorsqu'on me demandait des
            nouvelles de mon père ai-je
            répondu : " ça ne va pas mal ". Il
            était pourtant mort depuis des
            jours, voire des mois ! Certes, c'est
            plutôt dur à
            comprendre - ou c'est comme un autre qui se
            rappelle : tu caches aux amis un
            malade, tu l'entends derrière le mur se
            traîner seul vers les
            cabinets, cela pouvait se
            produire, tu l'as empêché par tes louches
            prières. Ou peut-être
            était-ce une sorte de tic,
            un signe de névrose
 
            
               " Pauvre âme
            ", je t'écris en script -
            restée pour faire le piquet aux limites,
            disons, de la compétence territoriale, en présence
            de la guérite ébréchée,
            venteuse, que le
            crépuscule réduit en cendre
            Drôle d'endroit pour une
            rencontre, mi- plate-forme
            spatiale mi-décharge à pic d'un
            côté (y est tracée une
            descente) où
            débouche le sentier muletier ouvrage militaire
            des Allemands pour une part, que depuis des  /années les éboulis
            rongent, de sorte que pour
            finir un de ces printemps tout
            s'écroulera.   Ainsi soit-il.
            Mais à cause de ce qu'il me
            fallait te dire (toi
            vivante pour peu de temps
            encore) tu vois combien je
            dois, jusqu'à  quand,  te plaindre une
            fois morte ? Que tu aies
            voulu me noyer, tendre,
            sale, impuissant, dans
            un verre, que moi-même
            je continue au fil du temps à me
            vouloir /tel que doucement tu
            mutilais ma personne de
            fils, rapproche des âmes
            avant l'heure séparées, toi ferme dans les
            embruns, sur le vertige des requins de ma
            peur. 
            
                 1. Moi qui ai
            toujours vénéré les
            dépouilles du futur, du futur
            seulement, de rien d'autre je n'ai la
            nostalgie quelquefois, je me rappelle
            à présent avec effroi quand sous mes
            caresses tu cesseras de t'inonder, quand tu seras
            séparée de mon plaisir et
            que peut-être, beauté d'avoir
            été tant aimée, douceur de m'avoir
            aimé, tu feras
            malgré tout semblant de jouir.   2. Les fois où
            c'est avec rage que dans ton
            ventre je vais cherchant ma joie c'est parce que,
            mon amour, je sais que le temps n'aura plus
            guère le temps de couler
            équitablement pour nous deux et qu'en
            rêve seulement ou si avant je me jette
            à bas de la course du temps je puis faire
            qu'un jour tu ne veuilles croire en l'amour
            d'un autre amour.   3. Un jour ou l'autre
            je vais te quitter, un jour après
            l'autre je vais te quitter, mon âme. Jalousie de
            vieillard, peur de te perdre - ou
            parce que j'aurai
            cessé de vivre, voilà tout. Mais je reste
            immobile, dans l'attente, comme reste
            immobile une branche où se tient
            immobile un moineau, je m'enchante
   4. Pas cette fois,
            pas encore. Quand nous
            glissons de nos bras ce n'est que pour
            chercher une autre étreinte, celle du sommeil,
            de la paix - et il faut, comme si
            c'était pour toujours, veiller à
            ce que l'épaule se repose, prendre garde
            à tes cheveux.   5. Il vaut mieux que
            tu ne saches pas sur quelles
            prières je m'endors, marmonnant quels
            mots dans le quart muet
            de la gorge pour qu'une fois
            encore l'avide sommeil divinateur
            ne m'équarisse.   6. Le cur qui
            ne dort pas dit au cur
            qui dort : effraie-toi. Mais moi je ne
            suis pas mon cur, je n'écoute ni ne
            prédis mon destin, je sais bien que te
            manquer, ne pas te perdre,
            fut le dernier malheur.   7. Tu bouges dans ton
            sommeil. Ne te retourne pas, ne me regarde pas
            de près, sans lumière ! il pour
            il, mot pour mot, je repasse le
            rôle qu'est la vie.     8. Je me demande si
            j'aurai le courage de me taire, de
            sourire, de te regarder qui me regarderas
            mourir.     9. Je ne demande que
            ceci : pour toi, bien que tu me sois
            chère, être à jamais
            léger.     10. Tu te tournes dans
            ton sommeil, dans un rêve, à la
            faible /lumière.  | 
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