Accueil | Sommaire généralBiographie | Bibliographie | Pages lyriquesManuscrits  | Galerie | Traductions 
Anthologie contemporaine  | Pages critiques sur la poésie modernePages critiques sur la prose | Cours et séminaires 

Le Nouveau Recueil | De l'époque... | Informations | Rechercher | Liens | E.mail  

 

      Le poème, lieu critique...

      par Jean-Michel Maulpoix

      Texte paru dans le n° 30 de la revue Furor, Genève. Octobre 2000.

     

    Force est aujourd’hui de constater en France, dans le domaine de la critique littéraire, une double faillite.

    Celle de l’Université, vecteur affaibli de ce qu’on appelle communément « la recherche », institution hypertrophiée, étrangère à l’ardeur théorique, recroquevillée sur l’ancien et le notoire, et toujours rechignant à constituer les oeuvres contemporaines en objets d’étude.

    Celle des « médias », aussi bien tenus par la loi du marché qu’investis par les groupes d’influences, plus désireux de dispenser leurs modèles que d’accueillir qui les dérange, contraints par ailleurs de parer au plus pressé, préoccupés avant tout de se vendre, donc de moins en moins aptes à éclairer le fait littéraire chaque fois qu’il s’avère complexe, ténu et difficilement identifiable.

    Face à ce déficit d’une écriture critique qui serait capable d’appréhender « l’extrême contemporain » et de le confronter à sa mémoire aussi bien qu’à son amnésie, je réaffirme la nécessité du lyrisme critique, c’est-à-dire du geste réflexif inhérent à l’écriture même, telle qu’elle invente, analyse et réfracte. La critique trouve refuge là où elle prend naissance : dans l’incessante relecture que fait l’écrivain de ce texte qu’il devient, dans cette surveillance où il tient ses abandons, ses impulsions ou ses impuissances.

    J’entends aussi bien par « lyrisme critique » l’état auquel la poésie parvient, quand elle a pris conscience que l’heure n’est plus à la révolution de nouvelles formes, mais refuse de céder à la tentation du bricolage postmoderne, pour se rendre suprêmement attentive aux éclats de sa voix et mesurer objectivement les forces qui la mobilisent ou l’étranglent.

    Le dernier lieu critique, tel pourrait être le poème, en ce soin qu’il continue de prendre de la langue : scène et souci, timbre et tenue, accident et contenance.

     

    Jean-Michel Maulpoix